BIHAC
Dans le guide tourisme Bosnie : découvrez Bihać, l’une des villes bosniaques de la région de la Krajina… Vous êtes à Plitvice, savez-vous que vous êtes à quelques minutes de la Bosnie? Pourquoi ne pas aller à Bihac, en Bosnie? C’est ce que l’on appelait pendant la guerre de Bosnie une enclave « croate », très disputée par les Croates qui en revendiquaient le territoire au nom de la présence d’une forte minorité croate. 90% des Serbes qui habitaient dans la région l’ont quittée. Bihac vous donnera un certain visage de la Bosnie, surtout si vous êtes allé à Mostar ou si vous comptez y aller…
Bihac n’est bien sûr pas la ville la plus incontournable de Bosnie, mais elle est très intéressante, en ce sens qu’elle fut très disputée par les croates au nom de leur nationalisme qui considérait que la présence de la minorité croate légitimait un rattachement à la Croatie. Finalement, Bihac est bosniaque, la minorité de croates est restée sur place ; 90 % des Serbes ont quitté la ville. Beaucoup de Serbes étaient militaires et pendant les années les plus dures de la guerre de Bosnie, les Tchetniks serbes menaçaient depuis les montagnes environnantes la ville avec leurs canons.
Bihac fut une ville majeure à la jonction de l’Ouest et de l’est, elle fut au Moyen-Age une ville royale libre, qui était très ancrée dans la chrétienté comme en témoignaient ses nombreuses églises et monastères environnants. Dès la période antique, elle fut occupée par les Illyriens, notamment par les tribus Japoda, comme en témoignent aussi aux alentours les habitations lacustres de Ripac. Peu à peu, dès l’occupation ottomane, la ville a adopté un urbanisme plus oriental et ses églises, comme celle de Ste Ante ont été converties en mosquées…
Quand les bosniaques se sont convertis à l’Islam à la fin du XVème s, cette église originale, produit de l’Église bosniaque des Bogomiles, unique au monde, a été transformée en mosquée…
Dès l’occupation romaine, Bihac s’est développée grâce à sa rivière Una, dont le nom signifie « l’unique » en raison de la pureté légendaire de ses flots… Malgré son cours d’eau glacial, la Una a été essentielle pour Bihac et pour l’activité rurale aux alentours. Aujourd’hui, un petit parc très agréable permet de se promener et d’en apprécier la beauté… A noter aussi que la ville en été est le théâtre de la Una Regata, une manifestation qui réunit des rafteurs du monde entier…
La première fois que j’ai découvert Bihac, c’était par hasard à la fin de l’année 1995. Je réalisais mon premier séjour en Croatie et en allant jusqu’à Knin pour découvrir – sans m’y attendre – les terres brûlées avant d’entrevoir la ville et son imposante citadelle, j’ai tenté de franchir la frontière sans passeport ni visa et à ma grande surprise, dans un poste frontière du bout du monde, complètement improbable, les douaniers trop étonnés de voir un touriste dans cette zone nous ont laissés pénétrer en Bosnie et apprécier la Krajina.
Sauvage, verte et désertique sur de longues distances, la Krajina est marquée par la ruralité montagnarde. On y observait à l’époque des renards au bord des routes, de rares voitures et des panneaux « attention mines »!, de rares villages dont le point central (un banc de fortune) est occupé par les anciens qui discutent autour d’un thé comme si de rien était, des hameaux abandonnés ou des fermes perdues, vivant en autarcie, des habitants profondément ancrés sur leur terre et marqués par la vie jusque dans les traits de leur visage, qui se promènent en charrette ou à pied et n’ont même pas l’électricité ni le téléphone…. Il fallait un peu plus de deux heures pour rejoindre Bihac… profondément marquée par la guerre toute fraîche … Quel paysage triste malgré un semblant de vie normale : partout on voit des impacts dans tous les bâtiments, plusieurs églises détruites ou broyées par les obus, dont les tombeaux ont même été pillés, des minarets en partie détruits également quand ce ne sont pas les pièces des mosquées qui sont crevées par des tentatives de démolitions…
Heureusement, aujourd’hui, Bihac est redevenue une petite ville paisible, au cadre de vie assez attractif, avec sa rivière comme attraction, ses rues piétonnes, ses terrasses de café animées et bondées à la belle saison et si représentatives de l’art de vivre anciennement « yougoslave » et maintenu après l’explosion de la Yougoslavie. Sans oublier son marché où l’on trouve toutes sortes de produits locaux à prix encore dérisoires.
A Bihac, on rencontre une population chaleureuse une fois que sont passées les premières minutes de distance critique qui permettent d’évaluer et déterminer les intentions de l’étranger… Ici les gens semblent voir leur quotidien rythmé par les besognes des saisons : coupe du bois, nettoyage des tapis, préparation des poivrons à sécher etc..
Depuis mon premier passage, la ville s’est progressivement reconstruite, lentement, non sans peine en dépit des investissements européens moins importants que dans les villes névralgiques comme Sarajevo ou Mostar. Les mosquées abimées ont été rénovées ou reconstruites, mais on a du mal à oublier qu’il y a eu une guerre pendant plusieurs années et que les habitants se sont un jour entretués, ont cessé de se marier entre communautés…
Que devez-vous voir à Bihac? Bihaćka kula (la tour de Bihac), le château, l’église, la mosquée centrale impactée pendant la guerre mais qui a réussi à résister. Construite sur le site d’une ancienne église du XIVème s, cette mosquée est le plus ancien symbole de l’occupation ottomane … Plusieurs minarets anciens parsèment la ville également. La rivière Una, avec aux alentours des randonnées possibles en montagne reste un lieu de balade privilégié. Bihac se situe dans une zone très rurale et montagneuse, qui offre de magnifiques paysages campagnards et permet d’apprécier des modes de vie encore très traditionnels malgré la volonté de modernisation liée à la reconstruction…